Tinder, Mon classeur, Réseau Contact, etc. Des sites web ou des applications mobiles dédiés aux rencontres, il y en a plusieurs. Les sites de rencontre sont la nouvelle tendance de l’heure. Selon une importante étude menée en 2016 sur le sujet, les sites de rencontre sont responsables de la formation d’un couple sur 5 en France, d’un sur 3 au Québec et d’un sur 2 aux États-Unis. Qu’en est-il cependant pour les personnes en situation de handicap? On doit malheureusement se poser la question. Voici les témoignages de trois personnes handicapées qui font part, à leur manière, de leur utilisation des sites de rencontres. Leur histoire permettra sans aucun doute de mieux comprendre le phénomène. Les propos recueillis se réfèrent à une enquête menée par le journal Libération.
La peur
Le premier cas est celui de Lydie; une jeune femme de 23 ans atteinte d’ostéogenèse imparfaite (mieux connu comme étant la maladie des os de verre). Comme elle le témoigne, le premier défi est de révéler à ces partenaires potentiels qu’elle se déplace en fauteuil roulant. Elle se rendait bien compte que cela effrayait les jeunes hommes à qui elle parlait. Cependant, la situation était encore pire lorsqu’elle mentionnait sa maladie. En effet, l’un des principaux symptômes de la maladie de Lydie est la fragilité extrême de ses os qui peuvent se fracturer au moindre impact. Les hommes sur les sites de rencontres disaient avoir peur de la «casser» à cause de son état. Il est même déjà arrivé qu’on lui dise : «je ne peux pas coucher avec toi, j’aurais l’impression de te violer». Selon elle, les sites de rencontres sont compliqués pour les personnes handicapées, car «les gens ont peur, ils s’imaginent le pire derrière leur écran».
La dévalorisation
Hélène, âgée de 38 ans, explique qu’elle a été victime d’un grand nombre de préjugés à cause de son handicap. Certains des propos qu’on lui a dits sont gravement blessants, ce qui a comme conséquence de la dévaloriser… au point où elle remet même en question sa place sur les sites de rencontre. Après avoir mentionné qu’elle souffre d’un handicap physique, plusieurs de ces partenaires potentiels y sont allés de propos dégradants : «Qu’est-ce que tu fous là?», «T’as pas le droit de vivre», «T’es plus consommable», «T’es plus baisable», etc. Hélène a toutefois vécu une belle histoire d’amour via un site de rencontre. Par contre, elle avoue que la plupart de ces expériences en la matière se sont avérées être des échecs.
Hommage à la différence
Martin, 34 ans, utilisant un fauteuil roulant pour se déplacer, ne passe pas par quatre chemins : «sur Internet, mieux vaut être auteur en fauteuil que beau gosse qui ne sait pas écrire». Étant lui-même un écrivain, Martin sait comment se différencier de la plupart des utilisateurs des sites de rencontre. Il comprend que la qualité de son écriture peut lui permettre de mieux présenter son handicap. Selon lui, être différent sur un site de rencontre n’est pas une mauvaise chose : «si vous, chères dames, cherchez un truc différent, ça tombe bien, je le suis». Toutefois, il est le premier à reconnaitre que les préjugés sont nombreux et, par le fait même, très contraignants.
Les interrogations de Martin concernent davantage la présentation de son handicap. Est-ce qu’il est préférable de mentionner le handicap dans le texte de présentation du profil? Peut-être est-il préférable de ne pas le dire avant la rencontre afin d’être sûr de ne pas perdre des points?
Dans un article de Radio-Canada du 12 février 2015, Marianne Rodrigue, étudiante en sexologie à l’Université du Québec à Montréal (UQAM), apporte des pistes de solution pour les personnes, comme Martin, qui se posent des questions à ce sujet. Le sujet est délicat, mais, selon elle, il existe deux modes de pensée concernant le dévoilement du handicap :
Il y a ceux qui affichent leur situation, qui parlent ouvertement de leur handicap. Selon Mme Rodrigue, ce serait comme de dire : «Ainsi, la personne le sait, si elle vient me voir elle est au courant. Donc ça ne va pas m’enlever des chances».
Il y a ceux qui préfèrent ne pas parler de leur handicap. On peut traduire cette action ainsi : «Tant qu’ils ne le disent pas et que les gens ne les rencontrent pas, ce n’est pas une question qui est soulevée. Mais après, ça peut devenir épineux ».
C’est donc à la personne de se faire sa propre stratégie. Le choix de dévoiler ou non son handicap peut malheureusement entraîner des conséquences. Tel que démontré par les expériences vécues par Lydie et Hélène, le parcours en ligne est parfois difficile. Pour Martin, il affirme que la situation est un peu mieux. Quoi qu’il en soit, il est préférable de faire ses propres tests afin de choisir ce qui convient le mieux par rapport au dévoilement du handicap.